L’Eglise, de sa fondation à nos jours

I / L’ EGLISE PRIMITIVE :

Fondée probablement à la fin du XIème siècle par les moines de l’abbaye bénédictine de Saint-Laumer à Blois, l’église de notre village au cours de ses neuf siècles est restée une petite église. D’abord constituée d’un cœur carré à fond plat et d’une nef rectangulaire plus petite que la nef actuelle, elle fut agrandie au XIIème siècle par l’adjonction d’une abside semi-circulaire communiquant avec le chœur par un grand arc en plein cintre. Renforcée à l’extérieur par deux contreforts, elle était percée de trois baies – très étroites (profondément modifiée aux XVIIème et XVIIIème siècles, elle a été complètement reconstruite en 1951 et à nouveau modifiée en 1995). La porte principale de l’église était ouverte au milieu du mur sud de la nef. Aujourd’hui murée, son emplacement est encore visible tant à l’extérieur qu’à l’intérieur où est aménagé une niche. Dans le mur nord de la nef, était creusé un enfeu* redécouvert en 1993. Les murs intérieurs étaient recouverts de peintures murales (cf. Statigraphie décors).

* Enfeu : Niche aménagée dans l’épaisseur du mur pour y déposer un cadavre (cf. Plan de l’église).

 

II/ L’ AGRANDISSEMENT DES XVème ET XVIème SIECLES :

Ayant subi sans doute comme beaucoup d’autres édifices religieux, dégradations et manque d’entretien pendant la longue période de crise de la guerre de cent ans, l’église bénéficia d’importants travaux de restauration et d’agrandissement une fois la prospérité retrouvée vers la fin du XVème siècle et le début du XVIème. La nef fut rallongée de quatre mètres environ vers l’ouest. Les murs de cette partie nouvelle étant moins épais, la limite de cet agrandissement est encore bien visible à l’intérieur de l’église. La nouvelle porte principale – l’actuelle – fut percée dans le pignon Ouest. C’est un portail en tiers-point surmonté d’une baie également en tiers-point (aujourd’hui obturée). Une grande baie toujours en tiers-point fut ouverte dans le mur sud apportant plus de lumière dans l’édifice. La charpente fut entièrement refaite nécessitant le rehaussement du pignon Est et le clocher prit son emplacement actuel. Posé sur quatre poteaux de bois renforcés de deux croix de Saint André bien visibles dans l’église, il fut ainsi séparé des murs de la nef évitant leur ébranlement lors des battements de la cloche.

 

III/ LES MODIFICATIONS DES XVIIème ET XVIIIème SIECLES :

L’abside fut alors séparée du chœur pour permettre l’installation en 1691 du retable. Une porte fut aménagée pour permettre de communiquer avec ce qui est devenu la sacristie. Dans la nef, l’autel de la Vierge et l’autel de saint Michel, de part et d’autre du chœur, furent construits avec des décorations provenant du château de Bury démoli alors. L’enfeu situé contre l’autel de la Vierge fut probablement muré à ce moment. En 1712, la porte de la façade Sud fut aussi murée. Dans l’ébrasement fut installé face à la chaire, le banc de la Marelle **. Etait-ce pour permettre la construction de bâtiments attenants à l’église que la porte originelle fut obstruée ? Toujours est-il que l’on trouve trace de deux constructions adossées à la façade Sud de l’église : un bâtiment avec grenier sous le clocher (la trace du conduit de cheminée était visible sur le mur extérieur lors des travaux de ravalement en 1995) et l’ancienne mairie du village jusqu’à la fin du XIXème siècle sur le coin sud-est de la nef et le chœur. Sur la façade nord, un bâtiment avec cave prenait appui également sous le clocher. Toutes ces constructions ont été démolies au cours du XIXème.

** Marelle : Conseil formé de paroissiens chargés de gérer les biens et les revenus de la paroisse et de l’entretien de l’église (encore appelée FABRIQUE).

 

IV/ LES DERNIERES RESTAURATIONS :

Au XIXème siècle, de nombreux travaux de réfection sur la toiture furent réalisés (mauvais état, intempéries, …) et le plafond actuel en plein cintre en briques pleines et plâtre a probablement été réalisé en 1832 comme l’indique la date gravée dans le plafond. En 1852, le cimetière autour de l’église, du presbytère et de la mairie fut transféré hors du bourg à l’emplacement actuel, pour des questions de salubrité.

En 1905, le vote de la loi sur la séparation des Eglises et de l’Etat entraîna la disparition de la Fabrique. La municipalité désormais propriétaire de l’église devint seule responsable de l’entretien. Le clocher et la toiture furent à plusieurs reprises l’objet de travaux de réfection importants (1911,1933, 1954,1990). En 1951, l’abside (la sacristie) fut entièrement restaurée et en 1983 une porte fut ouverte dans le mur sud du chœur.

En 1988, l’Association « Les Amis de l’église de Saint-Sulpice » a été créée pour la restauration et l’entretien en particulier de l’intérieur de l’édifice. Elle a entrepris le nettoyage des poutres, la réfection de la peinture et des boiseries de la nef et du chœur. Ces différents travaux ont remis à jour l’enfeu précédemment muré et des peintures murales anciennes (cf. infra). L’Association a aussi participé à la réfection du dallage du chœur (1998) et en 1999, 30 nouveaux bancs en chêne occupèrent la nef.

En 1993, la municipalité a fait procéder au ravalement des enduits extérieurs et à la réfection du dallage du chœur (1998).

 

V/ LES PEINTURES MURALES :

En décembre 1993, après la dépose des boiseries des murs nord et sud de la nef près des autels dédiés à la Vierge et à Saint Michel, des badigeons anciens avec des traces de polychromie ont été mis à jour. L’expertise réalisée a permis d’identifier plusieurs couches de revêtements muraux dont certains portaient les restes de décors : draperies, fleurs de lys, épis de blé, fleurs rouges et jaunes au pochoir, faux appareillage, décor de frise. Les plus anciennes sont probablement contemporaines du premier édifice et la plus récente, à fleurs de lys, date au plus tard du XVIIème siècle. Leur complexité, leur superposition et l’état le plus souvent de traces de ces peintures rendaient leur restauration impossible, elles ne sont plus visibles aujourd’hui. Elles ont cependant été conservées après avoir été fixées et protégées par plusieurs couches d’enduit (cf. Statigraphie décors).

 

VI/ LA CLOCHE :

Le clocher abrite aujourd’hui une cloche qui a été posée en 1891. Fondue par G. Bollée à Orléans, elle pèse 260 kilos, donne le « Si » et se nomme Henriette Valentine, prénom d’une Dame de Boisguéret de la Vallière, illustre famille de Saint-Sulpice. Elle a été électrifiée en 1990.   Elle succédait à d’autres cloches dont certaines ont laissé quelques traces dans les registres paroissiaux :

–  Le 22 mai 1712, jour de la Sainte Trinité, le curé de Saint-Sulpice, Nicolas Chéron, assisté des curés de Saint-Lubin, Saint-Bohaire, et de Fossé bénissait la cloche dont le parrain était Michel Bégon, seigneur de la paroisse et intendant au Canada et la marraine, sa femme, Elisabeth de Beauharnais. Remarquons à cette occasion que la tradition des vins d’honneur et autres verres de l’amitié n’est pas récente puisque le curé Chéron nous dit : « … Après la cérémonie, je donnay la collation à toute la compagnie. Il m’en coûta 10 écus. »

– Quelques trente ans plus tard, en 1743, les registres paroissiaux nous indiquent que la nouvelle cloche avait été fondue par les pères bénédictins à Blois avec la matière de la vieille cloche qui « pezoit 164 et la neuve 267. C’est 103 livres de métal d’augmentation pour la rendre d’accord ».  » …elle fut bénite et nommée Sulpice par Mr Marchais, le curé de Maroles, suivant la permission de Mr l’évêque le 26 aoust et montée le 27 « , jour de la fête patronale du village. On peut penser que c’est cette cloche qui fut descendue à la Révolution pour être conduite au district de Blois et y être fondue. La suppression du culte la rendait inutile et l’armée avait besoin de canons.

 

VII / L’ ENFEU :

Redécouvert en 1993 lors des derniers travaux de restauration, il date probablement du XIIIème siècle. Cette niche, aménagée dans l’épaisseur du mur nord de la nef près du chœur, est surmontée d’une voûte à claveaux en anse de panier. Au Moyen-Age, un enfeu pouvait servir de tombeau à un personnage important ; ce pouvait être aussi le lieu d’exposition du corps du défunt dans son linceul lors de l’office funèbre. C’est sans doute cette fonction que remplissait l’enfeu de notre église étant donné ses dimensions, en particulier sa faible profondeur (0,40 mètre). C’est probablement en 1691 qu’il a été muré lors de la construction de l’autel dédié à la Vierge. Les rites funéraires de cette époque ne le rendaient plus utile.

 

VIII / LA PIERRE TOMBALE D’ESTIENNE DE VERET :

Scellée dans le dallage du chœur, ses inscriptions en partie effacées, elle nous donne quelques éléments sur la qualité de ce seigneur de Saint-Sulpice, écuyer du Roy :

 » CY GIT NOBLE

 ESTIENNE DE VERET ESCUIER SIEUR DE POMMERES CAPITAINE DE DEUX CENTS HOMMES DE PIED

Q… SE R…OIE  O …T

SERVANT DE DESFUNT MONSEIGNEUR FRAIR DU ROY QUI DECCEDA LE 7 JOUR DE DECEMBRE … ».

Nous ne connaissons pas l’année exacte de sa mort. Divers documents nous laissent penser qu’il est décédé entre 1583, date de son mariage avec Dame Jehanne de Boys et 1602, date où sa charge seigneuriale est alors portée par Anthoine de Veret qui lui succéda.

 

IX / LA PIERRE CALCAIRE GRAVEE DE FRANCOIS TOURNEBOEUF :

Curé de Saint-Sulpice de 1628 à 1661, François Tournebœuf a été enterré le 26 Août 1661 dans le chœur de l’église :

 » CY DEVANT GYST VENERABLE ET DISCRETTE PERSONNE Mr FRANCOIS TOUNEBEUF, VIVANT, P(rê)B(t)RE, CURE DE CETTE ESGLISE LEQUEL A FONDE A PERPETUITE EN ICELLE ESGLISE UNE MESSE BASSE LES DIMANCHE ET UNE AUTRE MESSE BASSE LES JOURS DE FESTES SANS OBMETRE LES DEUX JOURS DE ST SULPICE EN SUIVANT POUR LE REPOS DE SON AME ET DE SES BIEN FACTEURS ET SOULAGEMENT DE MESSIEURS LES CUREZ QUE POUR LA COMMODITE DES PAROISSIENS LES DICTES MESSES SERONT CELLEBREES AU MAISTRE AUTEL A SIS HEURES EN ESTE ET A HUICT HEURES EN HIVERT ET A L’ORFERTOIRE SERA LE PEUPLE EXORTEZ DE DIRE UN PATER, UNG AVE A SON INTENTION ET A LA FIN DE LA MESSE SERA CHANTE UN LIBERA VERS ET ORAISON D’UN DEFFUNCT A SON INTENTION ET POURQUOY IL DONNE A UN PREBTRE VICAIRES A PRO… L’ADMINISTRATION DES SA(crements) »

Les registres paroissiaux gardent la trace de plusieurs autres curés enterrés dans l’église :

François Girard, mort à 35 ans le 30 septembre 1693 et enterré le lendemain.

– Solenne Chéron, curé de Fossé, décédé le 25 novembre 1745 et enterré le 26 à l’âge de 55 ans et 9 mois.

Nicolas Chéron, mort le 04 décembre 1752, à 75 ans environ, enterré le 05.

 

X / L’EPITAPHE DE MATHURIN ROBINEAU :

« A LA PLUS GRANDE GLOIRE DE DIEU REPOSE EN CETTE EGLISE LE CORPS DE MATHURIN ROBINEAU, MARCHAND, QUI A DONNE A PERPETUITE UNZE LIVRE DE RENTE POUR CONTRIBUER A  L’ESTABLISSEMENT D’UNE CONFRAIRIE DU ST SACREMENT DANS LA DITTE EGLISE A CONDITION QU’IL SERA CELEBRE EN ICELLE UNE MESSE BASSE TOUS LES MOIS POUR LE REPOS DE SON AME – PRIES POUR LUY – REQUIESCAT IN PACE »

Elle est scellée dans le mur nord de la nef près de l’autel dédié à la Vierge, conformément à sa volonté. Marchand demeurant à Saint-Sulpice, Mathurin Robineau fut inhumé le 11 février 1695. Il demanda dans son testament recopié sur le registre paroissial « que son corps feust soit inhumé dans l’églisse « et il donna à perpétuité une rente de 11 livres «  pour aider et contribuer à l’establissement et fondation d’une confrairie du St Sacrement dans laditte églisse de St Sulpice et soitte (souhaite) pour cela qu’il sera mis une épithafe au pilier de la chapelle nostre dame auquel il consent que la rente commencera sitôt et incontinent que son âme sera séparé de son corps. »

 

XI /  LE CIMETIERE :

Rares étaient ceux qui, à leur mort, trouvaient place dans l’église : les nobles, les prêtres, les notables, les bienfaiteurs de la paroisse. La majorité des habitants était inhumée dans le cimetière contigu à l’église au sud. Jusqu’à la fin du XVIIIème siècle, les corps étaient enterrés anonymement, les uns sur les autres sans tombe individuelle. Il fallait faire de la place selon les besoins. Dans tout cimetière, il n’était pas rare de voir affleurer les os mêlés aux pierres et aux cailloux. Tout changea au XIXème siècle quand le culte des morts entraîna la personnalisation des tombes et l’apparition des concessions de plus en plus souvent perpétuelles, demandant alors plus de place, et quand les connaissances scientifiques et les notions d’hygiène amenèrent à considérer les cimetières comme insalubres. Saint-Sulpice n’échappa pas à l’évolution des mentalités et le 21 mai 1850, le Conseil Municipal souhaita que le cimetière soit déplacé hors du bourg car « les terres du cimetière actuel étaient alors élevées de plus de deux mètres au-dessus des locaux contigus et que leur trop grand exhaussement était contraire à la salubrité et à la solidité des dits locaux… ». La translation du cimetière vers son emplacement actuel fut officiellement prononcée par arrêté préfectoral le 17 mai 1852.

 

Ch. LORIN – Référence : « Vous avez dit : Saint-Sulpice de Pommeray ?… » – Décembre 2000.

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